Immobilier : ce qui change avec le prélèvement à la source
14 Septembre 2018 – Crédit immobilier, revenus fonciers, investissement locatif sous défiscalisation, taxation des plus-values : autant de domaines peu ou prou concernés par le prélèvement des impôts à la source. Le point sur ce qui change pour les emprunteurs, les propriétaires bailleurs, les investisseurs et les vendeurs de logements.
Le gouvernement l’a confirmé le 4 septembre 2018 : le prélèvement des impôts à la source entrera bien en vigueur le 1er janvier 2019. Avec cette révolution fiscale, vous paierez vos impôts sur les revenus de l’année en cours, ce qui supprimera le décalage de la situation actuelle (en 2018, vous payez vos impôts sur les revenus 2017). Concrètement, le prélèvement s’appliquera au « montant net imposable à l’impôt sur le revenu » comme le précise l’Administration sur son site www.servicepublic.fr et s’effectuera directement sur le salaire ou la retraite. Reste une question : le prélèvement à la source, ça change quoi pour l’immobilier ?
Prélèvement à la source et crédit immobilier
Aujourd’hui, les banques calculent votre capacité d’endettement sur vos revenus nets avant impôt. Un chiffre qui figure au bas de votre bulletin de paie. Le principe : votre mensualité de crédit ne peut pas dépasser 33% de ce même revenu net avant impôt.
Critères bancaires inchangés. En 2019, avec le prélèvement à la source, votre bulletin de paie mentionnera le net après impôt, mais aussi, comme aujourd’hui, le net avant impôt. Quel chiffre les banques vont-elles prendre en compte ? « Elles signalent qu’elles continueront à se baser sur le net avant impôt pour calculer la capacité d’endettement » indique Cécile Roquelaure, directrice de la communication du courtier Empruntis.
Crédit : les impôts pris en compte ? Pour accorder un prêt, les banques se basent sur un autre critère : le reste à vivre. C’est la somme qu’il vous reste une fois votre crédit et vos charges (y compris les impôts) payés. Il s’établit en moyenne mensuelle à 1.200 € pour un couple plus 250 € par enfant à charge selon le courtier Vousfinancer. Valable en 2018, cette règle reste en vigueur l’an prochain. Bref, le prélèvement à la source n’a pas d’impact pour les emprunteurs.
La fiscalité des revenus fonciers et le prélèvement à la source
Vous êtes propriétaire bailleur, vous louez un logement vide, sous le régime fiscal des revenus fonciers. Cette année, rien ne change pour vous. Vous êtes imposé sur les revenus perçus en 2017 et vous déduisez les charges (travaux, primes d’assurance impayés de loyers, intérêts d’emprunt, etc.) de façon tout à fait classique.
Des acomptes à payer au fisc. Les revenus fonciers entrent dans le cadre du prélèvement à la source mais sous la forme d’un acompte que vous versez au fisc. Comment ça marche ? Une fois votre déclaration 2019 remplie, le fisc calculera votre imposition sur les revenus fonciers (et la CSG), imposition que vous payerez vous-même par acomptes mensuels ou trimestriels. Si vous ne louez plus, vous pourrez cesser de verser ces acomptes. Conseil : gardez une marge de manœuvre pour bien gérer la vacance locative ou d’éventuels impayés de loyers.
L’imposition des déficits fonciers en 2018. Pour bien comprendre l’impact du prélèvement à la source sur les revenus et les déficits fonciers, il faut rappeler une règle fiscale de base. Les charges (travaux par exemple) et les intérêts d’emprunt sont déductibles des loyers lorsque vous les déclarez au fisc. Si ces charges sont supérieures aux recettes (les loyers), un déficit foncier apparaît. Il est imputable sur vos revenus globaux à hauteur de 10.700 € par an, le solde (ainsi que les intérêts d’emprunt) étant reportable sur les revenus fonciers des dix années suivantes. Par exemple, si vous avez fait des travaux en 2017, vous les imputez sur vos revenus fonciers de 2017 et vous créez un déficit foncier. Ce dernier, en 2018, réduit votre base imposable donc vos impôts.
Revenus et déficits fonciers en 2019. L’an prochain, vous déclarerez vos loyers de 2018. Or les revenus courants de 2018 ne sont pas imposables. Avec l’année blanche, l’impôt 2018 est annulé par le Crédit d’impôt modernisation du recouvrement (CIMR). Dès lors, vous n’avez aucun intérêt à faire des travaux pour créer des déficits fonciers puisque vous n’avez pas besoin de faire baisser des revenus qui ne seront pas imposés. Un coup d’arrêt pour le secteur du bâtiment ! Du coup, le gouvernement a prévu des mesures transitoires.
Deux ans de déductions fiscales. « Les déductions liées à des travaux en 2018 s’imputeront à 100% sur les revenus fonciers de 2018 et à 50% sur les revenus fonciers de 2019 » explique-t-on chez Buildinvest, un spécialiste de la rénovation et de la défiscalisation. « En 2019, c’est la moyenne des dépenses supportées sur 2018 et 2019 qui sera prise en compte. » Dès lors, plusieurs cas de figure peuvent se présenter pour votre déclaration.
- Vous faites 10.000 € de travaux uniquement en 2018. L’effet fiscal lié aux dépenses de 2018 sera nul (année blanche). En 2019, vous pourrez déduire 5.000 € de vos revenus fonciers (la moitié des travaux de 2018).
- Vous faites 30.000 € de travaux uniquement en 2019. Vous ne déduirez que 15.000 € de vos revenus fonciers en 2019. Notez que si vous faites des travaux urgents en 2019, vous pourrez les déduire à hauteur de 100%.
- Vous faites 10.000 € de travaux en 2018 et 30.000 € de travaux en 2019. La déduction sera calculée sur 40.000 € et vous déduirez 20.000 € de vos revenus fonciers en 2019.
Optimisation fiscale pour les gros déficits fonciers. Rappelons que vous pouvez déduire, en 2019, la moitié des dépenses engagées en 2018. « La possibilité de reporter des déficits fonciers dans des conditions habituelles et de déduire en 2019 50% des travaux réalisés en 2018 peut être source d’opportunités »explique une note du Groupe Edmond de Rothschild publiée sur le site de l’Agefi. « Dès lors que le montant des travaux excède deux fois le déficit foncier annuel (2 x 10.700 € = 21.400 €) et deux fois le montant des revenus fonciers annuels, il sera possible de déduire davantage de ses revenus que le montant effectivement payé pour les travaux. » Le détail des calculs est disponible ici.
Attention : en matière de fiscalité des locations vides, les intérêts d’emprunt sont déductibles des revenus fonciers des dix années suivantes. Mais avec l’année blanche (et uniquement pour l’année blanche), cette déduction n’est pas possible.
Impôts : l’information à la source
Vous trouverez dans le Bulletin officiel des finances publiques (BOFIP) toutes les informations et autres précisions sur le prélèvement à la source.
• La page cardinale du BOFIP, qui renvoie vers plusieurs dizaines de pages sur le sujet est ici.
• La page du BOFIP sur le traitement des travaux dans le cadre des revenus fonciers pendant la phase transitoire est ici.
• La page du BOFIP qui indique que les revenus fonciers sont soumis à l’acompte est ici.
• Pour en savoir plus, vous pouvez vous tourner vers l’administration fiscale en cliquant ici.
Prélèvement à la source : investir en Pinel, Duflot, Scellier…
Réservé aux investisseurs en locatif dans le neuf, les avantages fiscaux Pinel, Censi-Bouvard, Duflot ou encore Scellier prennent la forme d’une réduction d’impôt. Avec le Pinel, par exemple, l’investisseur particulier déduit directement de ses impôts 2% du prix du bien chaque année pendant six ou neuf ans. L’opération peut être prolongée de trois ans, à raison de 1% du prix les dixièmes, onzièmes et douzièmes années. Aujourd’hui, la réduction d’impôt est incluse dans la mensualisation ou dans le versement des tiers provisionnels.
Avantages fiscaux : un acompte dès janvier 2019. A compter de 2019, les avantages fiscaux ne seront pas intégrés dans le prélèvement à la source. Pour autant, le montant dû au titre du Pinel (et des autres dispositifs comme le Duflot, le Scellier ou le Censi-Bouvard) n’est pas perdu. 60% de la défiscalisation seront versés dès janvier par l’administration, le solde (soit 40%) étant payé en août ou en septembre. Pour un avantage fiscal Pinel de 3.000 € sur un an, par exemple, le contribuable reçoit 1.900 € en janvier et 1.100 € en septembre. Dans la première mouture du prélèvement à la source, ces avantages devaient être versés en une fois, en août ou en septembre. Ce qui était bien plus inconfortable à gérer.
Nouveaux investisseurs : attention aux dates. Pour percevoir en 2019 l’acompte versé par le fisc dans le cadre d’un investissement Pinel, l’option pour ce régime fiscal doit être prise dans la déclaration des revenus de 2017, qui a été déposée au printemps 2018. Le décalage reste le même les années suivantes. Pour toucher l’acompte de 60% en janvier 2020, l’option pour le Pinel doit être indiquée dans la déclaration à remplir en mai ou en juin 2019.
Loueur en meublé non professionnel et prélèvement à la source
Vous êtes investisseur dans une résidence services ou vous louez un logement meublé ? Vous relevez du statut de loueur en meublé non professionnel, le LMNP. En 2018, vous êtes imposé sur les recettes locatives provenant de l’exercice 2017. Si vous avez opté pour le régime forfaitaire, vous payez des impôts sur la moitié de ces mêmes recettes. Avec le régime réel, vous déduisez de vos recettes les charges (intérêts d’emprunt, dépenses d’entretien, primes d’assurances, etc.). Et vous pratiquez des amortissements (faculté de déduire des loyers une partie du prix du logement). Un système qui réduit considérablement les loyers et qui peut même les rendre non imposables en toute légalité.
LMNP : ce qui change pour les impôts. Avec le prélèvement à la source, l’imposition des recettes locatives en location meublée fonctionne exactement comme celle des locations vides. Avec le régime forfaitaire, le fisc calculera votre imposition et vous paierez par acomptes mensuels ou trimestriels. Avec le régime réel, déduction de charges et amortissements diminuent ou effacent les loyers. Dans le premier cas, vous versez des acomptes au fisc. Dans le second, vos recettes locatives échapperont à l’impôt puisqu’elles auront été effacées par le truchement des déductions de charges et des amortissements.
Prélèvement à la source : et les plus-values immobilières ?
Les plus-values immobilières réalisées à l’occasion de la vente d’un logement restent imposables pendant l’année blanche et après. Elles ne sont pas soumises au prélèvement à la source. Concrètement, la plus-value est taxée à hauteur de 19% plus 17,2% de prélèvements sociaux (c’est le notaire qui s’occupe du calcul et du paiement). Un barème dégressif par année de détention permet d’alléger la facture. Les plus-values sont ainsi exemptées d’impôts après vingt-deux ans de détention, une durée qui passe à trente ans pour les prélèvements sociaux. Rappelons que les résidences principales sont exemptées de ces contributions.
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